De temps en temps, j’aime bien remettre mon autre casquette professionnelle, celle datant d’une petite vingtaine d’années quand même, en tant que soignant en psy. Je sors un peu de la ligne éditoriale habituelle du blog (coaching, communication et développement personnel), mais la frontière étant quand même très poreuse (quoi qu’en disent les intégristes du coaching), je prends plaisir à remettre le couvert sur cet autre sujet qui me passionne toujours autant. Et justement, le dossier que j’ouvre aujourd’hui et pour les deux prochains billets concerne les trois piliers incontournables pour sortir d’une dépression.

Deux petites précisions de rigueur pour commencer.

  1. Ce que je partage avec vous ici n’est que le fruit de ma propre expérience de soignant. Comme j’aime bien le dire parfois, c’est la vue que j’ai de ma fenêtre depuis vingt ans que j’accompagne des personnes en période de dépression aigüe. Il n’y a aucune étude qui valide ce que je vais avancer ici; juste de l’observation empirique.
  2. Ne généralisez pas. Le sujet de la dépression étant bien trop complexe pour lui attribuer des recettes magiques fonctionnant partout, tout le temps et avec tout le monde. Si vous souffrez de dépression, les trois piliers que je propose vous donneront un maximum de chances pour vous en sortir et éviter les rechutes. Il reste cependant des facteurs encore inconnus susceptibles d’influer sur l’évolution de cette pathologie. Dont acte 😉

Pour les plus pressés d’entre vous, voici les trois piliers qui, selon moi, donnent le maximum de chance de sortir d’une dépression… et éviter d’y revenir.

  • Le suivi scrupuleux du traitement
  • La prise en charge psychothérapeutique
  • Les changements réalisés, en soi… et en dehors.

Sortir d’une dépression. Premier pilier : le traitement

Il y a bon nombre de fausses croyances concernant les traitements psy dont font partie les antidépresseurs. Malheureusement, les rumeurs courant plus vite que les faits, il est temps de remettre un peu les choses à l’endroit. Voici donc quelques mythes sur les traitements qui méritent mon duo de choc préféré, le “coup d’boule-balayette”.

Mythe #1 : les antidépresseurs vont me rendre dépendant

Faux. Les seuls médicaments psy pouvant entraîner une dépendance sont les anxiolytiques de la famille des benzodiazépines (Lexomil, Seresta, Xanax, Témesta, Valium et tous leurs amis.) et certains somnifères (Noctamide, Imovane, Stilnox and Co.). Si vous devez discuter de la pertinence à prendre un traitement sur le long terme, c’est autour de ceux-là; pas des antidépresseurs. Ce qui m’amène au mythe numéro 2

Mythe #2 : je vais mieux, je n’ai plus besoin de prendre mon traitement

Vrai ET Faux. En fait, cela dépend de là où vous en êtes dans votre rétablissement. En règle générale, il est fortement conseillé de suivre scrupuleusement un traitement antidépresseur pendant les 6 mois à 1 an après un premier épisode dépressif (et je tablerais plus sur les 1 an). Déjà, il faut savoir qu’un antidépresseur met en moyenne entre 3 et 6 semaines avant d’agir à son plein potentiel. Du coup, si vous vous sentez mieux après 1 ou 2 mois de traitement, c’est juste normal… mais vous n’êtes pas sorti d’affaire pour autant. Si vous décidez d’arrêter le traitement à ce moment-là, ou d’en prendre un jour sur deux, vous vous exposez au risque, plus que probable, de faire une rechute. J’ai malheureusement (re)vu des dizaines de patients dans ce cas de figure.

Après, et en fonction de vos avancées sur les deux autres piliers que nous allons voir les prochaines fois, il est aussi envisageable que vous n’ayez plus besoin de traitement à un certain moment. Dans tous les cas, je recommande vivement de discuter avec votre médecin du désir de diminuer ou d’arrêter un traitement antidépresseur.

Mythe #3 : le traitement va modifier ma personnalité. Je vais ressembler à un zombie comme dans “The walking dead”

Faux. Désolé, mais vous serez recalé au casting de ‘The walking dead” si vous comptiez sur les antidépresseurs pour ressembler à un zombie. Ces traitements ont pour seul objectif celui de vous sortir de la phase dépressive. Ceci en apportant quelques réglages à ce qui s’est déréglé chimiquement dans votre cerveau (pour X et Y raisons). Certains ont un effet plutôt tranquillisant si l’anxiété s’est aussi invitée dans la partie (comme très souvent dans la dépression) et d’autres ont un effet plutôt stimulant si vous avez la sensation que vous lever du fauteuil équivaut à gravir l’Everest en tong en plein hiver. Ce sera en fonction de votre symptomatologie et de votre profil que le médecin choisira tel ou tel antidépresseur.

Dans tous les cas, rassurez-vous, votre personnalité restera intacte; si vous étiez un râleur ou une râleuse avant, vous resterez un râleur ou une râleuse après 😉

Mythe #4 : les effets secondaires vont me compliquer la vie

Vrai ET Faux. Vrai car comme dans tous les médicaments (psy et autres), il existe des effets secondaires. Le truc, c’est de ne pas prendre au pied de la lettre tous les effets secondaires que vous lirez sur la notice, et encore moins dans ce que vous trouverez sur internet. Fiez-vous plutôt à l’observation de vos propres sensations et évaluez votre niveau d’acceptation de ces éventuels effets sur une échelle de 1 à 10. Le 1 correspondant à une impossibilité totale de réaliser vos tâches quotidiennes (et donc une intolérance totale) et le dix correspondant à votre fonctionnement optimal (et donc une complète acceptation).

Faux, car en ce qui concerne les antidépresseurs et leurs effets secondaires, bien qu’apparaissant en début de traitement (quand ils apparaissent), ils sont la plupart du temps transitoires; c’est-à-dire qu’ils disparaissent au bout de quelques jours. Et comme vu plus haut, l’effet positif de l’antidépresseur n’apparaissant qu’au bout de quelques semaines, il serait donc dommage de ne pas lui donner sa chance.

Et encore une fois, si vous avez des effets secondaires très gênants pour votre fonctionnement quotidien, parlez-en d’abord à votre médecin. Il sera en mesure de vous éclairer sur les conduites à tenir.

En résumé

Le suivi strict du traitement antidépresseur est le premier des trois piliers pour sortir d’une dépression. Vous entendrez tout et n’importe quoi sur le sujet; et parfois même de votre entourage proche. Comme je vous le disais, fiez-vous plutôt à ce que vous ressentez. Si vous voyez une amélioration de votre état après quelques semaines de traitement, c’est que le truc fonctionne. Du coup, ne lâchez pas l’affaire, ce n’est que le début. Le traitement vous permet de renouer avec quelques ressources en vous, en mobilisant à nouveau votre énergie. Énergie que vous pourrez alors utiliser pour vous atteler au second pilier : le suivi psychothérapeutique.

C’est ce que nous verrons dans le prochain billet.


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