Billet du jour en réaction à un article que j’ai lu hier sur le web. Le sujet traitait du lien entre la dépression et le fait d’être trop gentil. Je ne suis pas convaincu de la simplicité apparente de ce lien et du raccourci implicite qu’il évoque. J’aimerais quand même apporter un point de vue différent sur le sujet, notamment concernant ce qui peut se cacher derrière le trop dans “être trop gentil”.

En premier lieu, je voudrais juste rappeler que la dépression est une maladie bien complexe dont les causes et les facteurs favorisants sont aussi divers et variés que les couleurs des bonbons dans un paquet de M&M’s . La réduire à un seul facteur, qui plus est faisant partie des forces et vertus de l’être humain, me semble un tantinet audacieux pour ne pas dire tendancieux.

Mais là n’est pas le sujet. D’ailleurs il existe déjà un billet sur ce blog concernant la dépression : “Dépression, stop aux amalgames et raccourcis”. Je vous invite à y jeter un oeil pour en savoir plus.

Intéressons-nous plutôt ici à la gentillesse et plus précisément à l’hypothèse d’être trop gentil.

Être trop gentil : le comparatif non référencé

À mon sens, une comparaison n’est possible et valable que s’il y a deux choses (ou plus) à comparer. Pourtant, dans notre langage courant et plus précisément dans les comparaisons, il n’est pas rare de formuler des phrases où manque la partie la plus importante : celle qui ferait référence à la comparaison que l’on exprime.

Exemples :

  • Je ne suis pas à la hauteur
  • Elle ne travaille pas assez
  • Je veux plus d’amour
  • Ça va moins bien
  • C’est mieux de faire ça
  • Tu es trop gentil… 😉

Dans toutes ces propositions, il nous manque en effet une information essentielle pour pouvoir comprendre le sens de ce qui est dit. Sans cette donnée capitale, la communication peut s’arrêter tout net; un peu comme si vous déposiez un gros paquet à la porte de quelqu’un et que vous partiez en courant. Bon OK, ça peut lui faire une surprise, mais ça coupe un peu le plaisir des échanges qui suivent l’ouverture du paquet, non ?

Ainsi, pour maintenir le lien et pratiquer à minima une écoute active, l’idée est alors précisément de questionner le comparatif omis par la personne. Pour ça, rien de plus simple, il suffit de lui demander par rapport à qui, à quoi ou à quand elle émet cette proposition. Elle ira alors chercher cette référence comparative et, si elle ne la trouve pas, elle prendra alors conscience que sa proposition n’a pas vraiment de sens.

Donc, pour revenir à notre sujet du jour, je pose la question :

Être trop gentil; OK, mais trop par rapport à quoi, à qui ? Y a-t-il une norme pour la gentillesse ? S’il y a des “trop gentils”, il y aurait donc des “juste gentils” ou des “pas assez gentils” ?

Je vous imagine sourire… et c’est bon signe. Vous venez de vous rendre compte du non-sens de cette proposition.

Tournons-nous maintenant vers ce qui se cache derrière le trop dans “être trop gentil”.

Dans être trop gentil, il y a surtout “trop”

Et c’est de ce côté que les choses sont intéressantes à regarder. Pour ça, je vais m’aider d’une notion que nous propose l’analyse transactionnelle, les drivers.

Pour faire simple, les drivers sont des messages contraignants issus de notre enfance pouvant nuire à notre fonctionnement quotidien une fois adulte. Ce sont ces petites voix internes plus ou moins conscientes qui nous rappellent non sans autorité parfois, les comportements ou attitudes que nous “devons” adopter vis-à-vis de soi, des autres ou du monde.

Rien à voir avec la schizophrénie, hein, rassurez-vous 🙂

Les drivers sont au nombre de 5 :

  • Sois fort
  • Dépêche-toi
  • Fais plaisir
  • Sois parfait
  • Fais des efforts

À noter que tous ces drivers peuvent aussi être des ressources quand ils sont écoutés sous un angle plus positif. Je vous donnerai un exemple plus tard avec le sujet qui nous concerne aujourd’hui.

(Pour plus d’infos sur les messages contraignants, je vous invite à lire cet article très bien écrit par une consœur : prenez les commandes de votre vie )

Alors chers lecteurs, à la lecture de ces cinq drivers, avez-vous trouvé celui qui se cache derrière le “trop” dans “être trop gentil” ?

C’est en effet le driver “Fais plaisir” qui conduit une personne à adopter ce comportement d’être trop gentil. Et j’aime à le rappeler, ce n’est qu’un comportement et il ne vous caractérise en rien. Vous ÊTES bien plus que vos comportements.

Ainsi, le message généré par ce driver pourrait se formuler comme ceci :

Il est important d’être gentil avec tout le monde et d’accepter les demandes d’autrui. Il faut éviter les heurts et les conflits avec les autres.

Le truc, c’est que ce message vous envoie en même temps une information illusoire, une belle poudre aux yeux, digne des plus grandes supercheries psychologiques, du genre :

Tu vas pouvoir faire plaisir à tout le monde et être aimé de tous.

Du coup, les principaux comportements non adaptés qui en découlent peuvent être de cet ordre :

  • Éprouver des difficultés à dire non
  • Faire passer ses propres besoins au second plan
  • Éviter les conflits
  • Parfois envahir l’autre en voulant l’aider “à tout prix”
  • Ignorer comment formuler des demandes pour soi-même
  • Avoir peur de décevoir
  • etc.

Attention, ne jetons pas non plus le bébé avec l’eau du bain (cette expression est horrible, mais je l’adore 🙂 ). Comme je le disais plus haut, ce driver, quand il est suivi sous un angle plus positif, génère aussi des ressources et des qualités humaines intéressantes comme l’empathie, la flexibilité psychologique, l’altruisme ou encore l’adaptabilité à un nouvel environnement.

C’est qui le patron ?

Pour enfin reprendre ce driver à votre compte et ne plus vous laisser guider aveuglément vers des comportements que vous regretterez tôt ou tard (comme celui d’être trop gentil), il existe une sorte de patch correctif à ce driver; il se nomme

Pense aussi à toi

Penser à soi c’est avoir la capacité de connaître ses besoins et de se donner les moyens d’y répondre. Ce n’est en aucun cas de l’égoïsme, car s’il est important de considérer les demandes des autres, il est également important de reconnaître son propre désir d’y répondre … ou pas.
De plus, et c’est un peu la cerise, en pensant à vous et à vos besoins, vous donnerez une image de quelqu’un qui se respecte et qui, du coup, sera respecté. La boucle est bouclée et les “dons” que vous ferez à l’avenir auront une teinte bien plus authentique.

Comment faire pour penser à soi, allez-vous peut-être me demander ?

Une première piste vous est proposée dans ce billet : “comment aider véritablement quelqu’un ?

Pour le reste…

Source : “De l’analyse transactionnelle à l’action transactionnelle” Claudine Catry


Si vous-même avez l’impression que certaines personnes profitent de vous et voulez mieux vous positionner dans vos relations, contactez-moi ici. Nous pouvons travailler ensemble.


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